« Pourquoi pas le Hermès de l’armagnac ? »

Dans la continuité familiale, Marc Darroze créé une gamme d’assemblages de 8 à 60 ans d’âge. Et installe sa marque sur le marché du haut de gamme et de la rareté.

Ecrire que la famille Darroze cultive tradition et qualité, est un doux euphémisme. D’ailleurs, Marc, aime à replonger dans cette histoire familiale de restaurateur à Villeneuve de Marsan. « Dans les années 50-60, mon grand-père régnait en maître aux fourneaux (deux étoiles Michelin, Ndlr) et mon père eut une idée de génie. Alors que nous nous approvisionnions dans les fermes de villages alentours en volailles, foies gras, légumes et autres, il commença à acheter des armagnacs aux petits producteurs ». Pour les servir aux clients du restaurant. Sans le savoir, Francis Darroze débutait la constitution d’une extraordinaire cave à armagnacs. « Enchantés par les eaux-de-vie qu’ils dégustaient, les collègues restaurateurs de mon père lui en réclamaient, raconte Marc Darroze. C’est ainsi que de quelques bouteilles, il achetait des pièces d’armagnacs ».

Sans le vouloir, Francis Darroze est devenu négociant. Un négoce d’un genre et d’une philosophie particuliers. « Certes mon père vendait de l’armagnac mais en conservant l’identité, l’origine et le nom des propriétaires qu’il m’était en avant. » A la fin des années 60, installé à Roquefort, Francis Darroze est un dénicheur-sélectionneur d’armagnac. Cinquante ans plus tard, Marc poursuit l’aventure. Avec un même bonheur. « La démarche est toujours la même, se réjouit le négociant. Nous travaillons avec une trentaine de petits propriétaires, chez onze d’entre eux nous distillons avec notre propre alambic. » Et comme l’avait imaginé Francis Darroze, ces petits éleveurs trouvent, grâce au négociant, des marchés souvent inespérés.

Volumes doublés en deux ans

En plus de cinquante ans, Darroze s’est imposé comme « Le » détecteur de pépites qu’il propose sans les transformer. Garantie d’authenticité, de qualité, de goûts propres à chaque producteur. Au point qu’aujourd’hui, Darroze est une marque qui rassure l’amateur de spiritueux. « Sans doute, concède Marc Darroze, mais attention, notre marque ne vendra jamais autre chose que de l’armagnac. » On l’aura compris, on ne transige pas avec l’histoire familiale et les valeurs qui y sont attachées. Pour autant, le négociant cherche toujours  un coup d’avance. Ainsi la marque Darroze, spécialisée dans les armagnacs millésimés de derrière les fagots, vient de lancer une collection de grands assemblages. « Nouvelle stratégie de la maison, commente son propriétaire. L’idée est de proposer des produits en style et en degré, moins pointus. Pour amener, un jour, le nouveau consommateur vers du millésime. »

Bingo. Cette nouvelle approche avec ces assemblages (de 8-12-20-30-40-50-60 ans) est un formidable voyage gustatif et pédagogique dans l’univers de l’armagnac. On entre sur la pointe des pieds par une jeune eau-de-vie, idéale pour les cocktails, on chemine délicieusement avec un 12 ans, jusqu’à des produits à la maturité maîtrisée. « Le consommateur note l’évolution des couleurs, des tanins naturels, de l’effet de la barrique, s’exalte Marc Darroze. L’arrivée de cette gamme d’assemblage a dopé les ventes. En 18 mois, Darroze est passé de 24 000 à 50 000 bouteilles avec 55% des volumes pour les assemblages. Un coup de maître. Marc Darroze se réjouit mais ne s’enflamme pas. « Nous ne serons jamais le Rémy Martin de l’armagnac, plaisante-t-il, mais peut-être l’Hermès. » Preuve, pour ceux qui en douteraient, que Darroze poursuivra sa quête du beau et du haut de gamme.

 

Septembre 2015